Le financement du terrorisme : principaux acteurs, stratégies et sources
Magnus Ranstorp
Suite aux attaques terroristes du 11 septembre 2001, le problème de la détection et de l’interdiction de financer le terrorisme a été considéré comme prioritaire pour l’Union européenne (UE) et la communauté internationale. Alors que les plans terroristes synchronisés d’Al Qaïda représentaient un coût estimé à 500 000 dollars, le groupe État islamique (EI) est devenu l’organisation insurrectionnelle et terroriste la plus riche du monde suite à l’établissement de son califat en 2014. Le financement de l’EI, qui est doté d’un budget annuel d’environ deux milliards de dollars selon les services de renseignement français, montre la complexité et la diversité de financement du terrorisme, car les flux de revenus provenaient de différentes sources internes et externes. Un rapport de 2015 du Groupe d’action financière (FATF par ses sigles en anglais) répertoriait cinq principales sources de revenus : les gains illicites obtenus par l’occupation du territoire (le pillage bancaire, le racket, le contrôle des champs pétrolifères et des raffineries, les taxes illicites sur les biens et services et les impôts sur l’argent circulant sur le territoire sur lequel l’EI évolue); les enlèvements contre rançon ; les dons y compris ceux d’organisations à but non lucratif ou ceux obtenus par le biais de ces organisations ; l’aide matérielle des combattants terroristes étrangers (CTE) ; et la levée de fonds par des réseaux de communication modernes (FATF, Financing of the Terrorist Organisation Islamic State in Iraq and the Levant (ISIL), février 2015). Toutes ces sources de revenus varient en fonction de l’occasion et de la pression que la coalition contre l’EI exerce sur le groupe.
Bien que l’envergure et la portée des activités de financement de l’EI soient uniques, le financement du terrorisme dépend de la taille et de la nature de l’infrastructure du groupe terroriste et de la finalité du financement. Même les attentats terroristes de taille moyenne requièrent un financement pour la logistique, les lieux de retraite, l’achat d’armes et les moyens de propagande. Par exemple, les attentats perpétrés à Madrid en 2004 ont coûté 10 000 dollars, tandis que ceux de Londres en 2005 ont occasionné un coût d’environ 14 000 dollars. Une étude d’Emilie Oftedal sur 40 cellules terroristes qui ont comploté ou mené à bien des attentats en Europe occidentale entre 1994 et 2013 a déterminé que la majeure partie des plans d’autofinancement et plus de 75 % d’entre eux ont coûté moins de 10 000 dollars. (Emilie Oftedal, The financing of jihadi terrorist cells in Europe. The Norwegian Defense Research Establishment, 2014). L’évolution des « extrémistes nationaux », les « loups solitaires » ou les petits groupes autonomes qui utilisent un modus operandi terroriste simple mais très efficace, comme les attaques au camionbélier ou au couteau, est une preuve de plus que les coûts opérationnels sont moins élevés qu’avant et qu’ils sont plus difficiles à détecter par les forces spéciales anti-terroristes. Par conséquent, le financement du terrorisme englobe un large éventail d’activités financières, de la logistique et du financement d’activités qui aident à maintenir les infrastructures terroristes aux aspects opérationnels qui dépendent des objectifs, au modus operandi et à l’envergure des opérations terroristes.
Cet article donne un aperçu des principaux acteurs, des stratégies et des sources de financement dans quatre domaines thématiques : méthodes de microfinancement des combattants terroristes étrangers ; activités criminelles et le lien entre la délinqunce et le terrorisme ; sources caritatives de financement du terrorisme ; financement des États étrangers.
Méthodes de microfinancement des CTE
Les dernières informations ont révélé que les combattants terroristes étrangers emploient des méthodes de microfinancement très diverses pour se financer ou pour la cause de l’EI. Deux études récentes (2017) du Collège de la défense nationale suédoise sur les activités de financement des CTE suédois ont révélé qu’ils avaient pratiquement tous reçu un type d’aide sociale, quelques-uns avaient obtenu des prêts étudiants et qu’il y avait beaucoup de cas de fraude financière, allant de prêts bancaires, de prêts par SMS, de fraude à la TVA, de vols de voitures, de fraude à l’assurance, à la collecte d’argent par le biais d’organismes de bienfaisance ou de crowdfunding. Les autorités suédoises se penchent de plus en plus sur la lutte contre les activités financières en menant des enquêtes contre la fraude. Et plus précisément, les autorités fiscales suédoises ont enquêté sur les CTE par la méthode Al Capone, ce qui a donné lieu à une fiscalité plus lourde dans 70-80 % des cas.
De même, les services de renseignements danois (PET) informent que 56 % des 150 CTE danois (84 personnes) recevaient des aides sociales. Parmi ces 84 cas, 43 % bénéficiaient de prêts étudiants. Par ailleurs, les autorités danoises ont découvert un cas important en 2016, impliquant des espagnols recrutés par l’EI à Melilla, qui étaient complices d’extrémistes danois dans une fraude à la TVA s’élevant à 59 millions de couronnes danoises (environ 10 millions de dollars).
Le schéma est similaire dans toute l’Europe, où les CTE ont reçu des aides sociales obtenues frauduleusement après avoir rejoint la Syrie et l’Irak. Les services de sécurité européens ont découvert que les CTE et les djihadistes avaient réclamé illégalement des prestations sociales s’élevant à plus de deux millions d’euros en Europe entre 2012 et 2016 (David Chazan, « French jihadists regularly received welfare payments after joining Isil, police reveals », The Telegraph, 26 octobre 2017). Les enquêteurs français ont déterminé que les recrues de l’EI avaient utilisé leurs prestations de chômage et des allocations familiales pour financer l’EI d’un montant total de 500 000 euros, envoyés depuis la France entre 2012 et 2017 (Christophe Cornevin, « Ces djihadistes français en Syrie qui touchaient encore leurs allocations sociales », Le Figaro, 26 octobre 2017). Les enquêteurs avaient détecté 420 virements frauduleux où 190 personnes envoyaient de l’argent depuis la France qui était reçu par 210 personnes en Turquie et en Syrie. Les terroristes se finançaient aussi par le biais de prestations sociales. « Au moins cinq des auteurs présumés des attaques terroristes de Paris et de Bruxelles se sont en partie financés avec des aides sociales et ont reçu en tout plus de 50 000 euros jusqu’à quelques semaines avant les attentats » (Valentina Pop, « Belgium to Expand Targeted Security Measures in Brussels », Wall Street Journal, 29 septembre 2016).
Connaître les méthodes de microfinancement des CTE fournit des renseignements précieux sur les connexions financières, les structures des réseaux et les lignes logistiques d’approvisionnement. L’identification de ces connexions permet aux services de renseignements de mieux comprendre les noeuds et les liens opérationnels fondamentaux. Ceci implique une plus grande coordination dans le domaine du renseignement entre les services secrets, les forces de l’ordre et autres organismes gouvernementaux importants et les institutions financières.
Il n’a pas été facile de suivre les flux financiers des CTE, surtout parce que les transferts ont été faits vers des banques turques et dans des bureaux de change au Sud de la Turquie, à la frontière avec la Syrie. Certaines institutions financières, dans le respect du règlement sur la lutte contre le blanchiment d’argent, ont identifié les transactions entre les banques européennes ou les bureaux de change et les agences de transfert d’argent internationales avec leurs homologues dans des localités du Sud de la Turquie, de l’autre côté de la frontière syrienne.
Activités criminelles : lien délinquance-terrorisme
Les dernières enquêtes sur le terrorisme ont déterminé qu’il existe une relation inverse entre la délinquance et le terrorisme. Autrefois, les grands groupes terroristes consolidés, comme l’IRA provisoire en Irlande du Nord, étaient un hybride entre la délinquance et le terrorisme où le groupe terroriste adoptait des méthodes criminelles pour financer ses opérations et son organisation. Une étude récente sur le financement de l’IRA provisoire montre qu’elle se finançait à travers des pubs dirigés par des paramilitaires, d’impôts révolutionnaires/racket/enlèvements, de taxis, de hold-ups, d’escroqueries, de contrebande et même de dons libyens (Isabel Woodford & M. L. R. Smith « The Political Economy of the Provos : Inside the Finances of the Provisional IRA-A Revision », Studies in Conflict & Terrorism, 41:3).
Comme Gaub et Lisiecka ont pu remarquer, « l’interaction entre la délinquance et le terrorisme … écourte le temps entre la radicalisation et l’action » (Florence Gaub et Julia Lisiecka, « The crime-terrorism nexus », European Union Institute for Security Studies, avril 2017). Actuellement, comme en témoigne le problème des CTE, ces personnes, dont la plupart ont des casiers judiciaires, adoptent une idéologie takfiri- salafiste et basculent dans le trafic de drogue et commettent des délits mineurs et des fraudes financières pour financer des opérations terroristes. Par exemple, les gains obtenus grâce au trafic de drogue ont été mis en évidence lors des attentats de Madrid (2004), du groupe Hofstadt (2004), du cas de Mohammed Merah (2012) et celui d’Anis Amri, l’assaillant de Berlin (2016) qui, non seulement, vendait de la drogue, mais en consommait aussi. Selon l’Europol, les enquêtes sur les attentats terroristes de Bruxelles (2016) et de Paris (2015) ont révélé que quelques auteurs étaient impliqués dans le trafic de drogue et entretenaient des contacts avec des bandes criminelles impliquées dans le trafic d’armes et dans l’élaboration de faux papiers.
Les rapports gouvernementaux nationaux au sein de l’UE indiquent aussi qu’un grand nombre de CTE ont des casiers judiciaires. Par exemple, l’Allemagne informe qu’au moins 66 % de ses 784 CTE ont fait l’objet d’une enquête judiciaire et que plus de 53 % des criminels condamnés avaient deux ou trois condamnations de plus (Daniel H. Heinke, « German Foreign Fighters in Syria and Iraq: The Updated Data and its Implications », CTC Sentinel, Vol.10, N. 3,2017). En Norvège, les services de sécurité concluaient dans une étude de l’année 2016 réalisée sur 137 djihadistes radicalisés (et CTE) que 68 % d’entre eux avaient été suspectés d’avoir commis des actes criminels, avaient été accusés de les commettre ou avaient été condamnés pour ces actes avant leur radicalisation. Aux Pays-Bas, plus de 60 % d’environ 300 djihadistes avaient fait l’objet d’une enquête judiciaire ou avaient été condamnés. Ce modèle uniforme semble confirmer l’argument d’Olivier Roy que de nombreux djihadistes sont plutôt des radicaux islamisés que des islamistes radicalisés.
Les terroristes profitent de faux papiers pour voyager, de l’accessibilité aux armes des gangs de rue (par la route des Balkans), de réseaux de trafiquants et de lieux de retraite pour se déplacer sans être détectés. Ils échangent des connaissances opérationnelles entre eux et avec le monde criminel. Cela ne s’applique pas seulement aux communications sécurisées par des applications de messagerie cryptée mais aussi aux méthodes innovantes pour passer inaperçus aux yeux des services de renseignements et des forces de l’ordre. Par exemple, les terroristes ont utilisé des cartes prépayées pour préparer les attentats de Paris en novembre 2015 et pour garder l’anonymat. Les assaillants de Paris disposaient aussi d’un grand nombre de téléphones jetables et utilisaient des messageries cryptées pour communiquer entre eux. Rahmat Akilov, le terroriste auteur de l’attentat au camion-bélier à Stockholm en avril 2017 a employé un autre modus operandi terroriste innovant : il a utilisé les réseaux sociaux russes Odnoklassnik et VKontakte et il a fourni 53 cartes SIM prépayées anonymes à ses contacts de l’EI en Syrie, qui l’ont aidé à ouvrir un compte Whatsapp.
Il est essentiel de comprendre les interconnexions entre les délinquants et les extrémistes pour découvrir les groupes terroristes, leurs liens entre les réseaux sociaux et leur modus operandi. Et plus spécialement, les différentes méthodes criminelles offrent un large éventail de possibilités aussi bien aux délinquants qu’aux terroristes. Très souvent, cette convergence s’articule autour du vol ou de l’usurpation d’identité, ce qui signifie que la biométrie est une arme importante pour les combattre. Le GAFI s’est principalement concentré sur le financement des activités de recrutement des organisations terroristes (FATF Report, Financing the Recruitment for Terrorist Purposes, janvier 2018). Comme Basra et Neumann l’ont signalé, ce lien entre le terrorisme et la délinquance exige que « les enquêteurs, les analystes et les législateurs remettent en question les idées soutenues depuis longtemps sur comment lutter contre le terrorisme, la délinquance et la radicalisation » (Rajan Basra et Peter Neumann, « Crime as Jihad: Developments in the Crime-Terror Nexus in Europe », CTC Sentinel, vol.10, n. 9, octobre 2017). Les enquêtes ont conclu que la remise en liberté de prisonniers condamnés pour terrorisme accentuera considérablement les risques pour la sécurité dans de nombreux États de l’UE.
Une autre priorité des services de renseignements est celle de se centrer sur la compréhension de la manière dont les nouvelles technologies influencent sur les méthodes terroristes utilisant des communications sécurisées et des nouvelles techniques pour virer des fonds anonymement à travers les frontières. Un aspect sur lequel ils doivent se pencher est le rôle des monnaies virtuelles et leur éventuelle utilisation frauduleuse de la part des terroristes. Un autre point est celui du lien entre les terroristes et l’impression 3D, ainsi que l’utilisation du darkweb (internet sombre, masqué).
Sources caritatives de financement du terrorisme
Le problème des organismes de bienfaisance et leur liens potentiels avec le financement du terrorisme a toujours été très difficile pour les gouvernements occidentaux. C’est un sujet politique particulièrement grave, car le monde est confronté à la plus grande crise humanitaire depuis la Seconde Guerre mondiale avec plus de 65 millions de personnes déplacées et 20 millions d’entre elles risquent de mourir de faim. Les institutions financières et les gouvernements ont de grandes difficultés à garantir que le financement public destiné à des causes caritatives arrive réellement jusqu’aux civils qui souffrent, au lieu d’échouer dans les mains des terroristes. De nombreux organismes de bienfaisance connaissent des retards dans les transactions, des refus ou des fermetures de comptes de la part des banques en raison des préoccupations suscitées par le risque du financement du terrorisme.
Les organismes de bienfaisance islamiques sont une source d’inquiétude car ils peuvent être vulnérables aux abus du fait que le zakat (les dons philanthropiques islamiques) est obligatoire pour les musulmans. Par ailleurs, le versement de contributions caritatives aux organisations d’insurgés ou terroristes menant des activités militaires, sociales et politiques complique la tâche de distinguer où commence une partie de l’organisation et où termine l’autre. C’est là un facteur important pendant le déroulement des procès contre des terroristes et qui explique que seule la branche militaire du Hezbollah et non pas le reste de l’organisation militante chiite, apparaisse sur la liste des organisations terroristes de l’UE.
Les organismes de bienfaisance s’exposent au grand risque d’être utilisés illégalement, en connaissance de cause ou non, pour financer des activités terroristes. Il est possible de détourner des fonds à des fins terroristes et il existe un risque considérable, si les organismes de bienfaisance sont présents dans des zones contrôlées par des groupes terroristes. Les gouvernements et les institutions financières ont développé ce que l’on appelle « des indicateurs de drapeaux rouges » pour détecter et minimiser le risque que les organismes de bienfaisance financent le terrorisme en utilisant de fausses entreprises, des sociétés « écran » et des banques « écran », voire même de multiples comptes bancaires étrangers et d’importants retraits en espèces, ainsi qu’en mélangeant des fonds de l’organisme de bienfaisance avec des fonds personnels.
Certains organismes de bienfaisance dirigent des sociétés écrans utilisées pour le recrutement, la propagande et le financement. Par exemple, les LTTE (Tigres Tamouls) ont créé des sociétés complexes et des organisations de façade pour intimider les adeptes tamouls et obtenir des soutiens pour leur cause.
En 2017, le GAFI déclarait qu’il avait enregistré plus de 100 cas dans le monde d’utilisations présumées illégales d’organismes de bienfaisance pour financer le terrorisme. Tel est le cas, par exemple, qui s’est produit à Birmingham en 2011 lorsque « trois personnes ont été condamnées pour s’être fait passer pour des travailleurs de l’organisme de bienfaisance Muslim Aid pour le financement d’un attentat à la bombe » (LawrenceWhite, « Three hundred UK charities hit by global crackdown on illegal funds », Reuters, 27 juillet 2017). En conséquence, depuis 2015, les comptes bancaires de plus de 300 organismes de bienfaisance ayant leur siège au Royaume- Uni ont été fermés.
Certains organismes utilisent les réseaux sociaux et le crowdfunding pour obtenir des fonds. D’autres organismes de bienfaisance emploient les réseaux de transferts d’argent ou système hawala (réseau informel de transferts de fonds). Ces réseaux sont l’un des services financiers les plus utilisés et ils existent dans tout le Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Asie du Sud et du sud-est. Ces systèmes de transferts d’argent sont très souvent le cordon ombilical entre les communautés de la diaspora et leurs familles dans les pays d’origine. Cependant, les réseaux hawalaprésentent des problèmes importants pour les services de renseignements et les forces de l’ordre au moment de découvrir leurs illicites propos (Bennett Seftel, « Dark Money: How Militants Exploit Hawala to Fund Terror », Cyber Brief, 8 février 2017). Selon certaines sources, Ben Laden avait dit une fois « qu’il profiterait des ‘failles du système financier occidental’. Mais le système hawala n’est pas une faille mais un canon ». (« Hawala Networks: The Paperless Trail of Terrorist Transactions », Cyber Brief, 16 mars 2017).
Financement des États étrangers
Les organisations terroristes sont très souvent des entreprises criminelles transnationales avec des sources de financement diversifiées. Certaines organisations terroristes possèdent des entreprises de grande taille et réalisent un large éventail d’activités légales et illégales. Ces organisations reçoivent souvent d’importants financements publics pour s’assurer qu’ils satisfont aux exigences de leurs directives et pour pouvoir les contrôler. Par exemple, le rôle du financement public iranien du groupe libanais Hezbollah est bien documenté. Parmi les sources de revenus du Hezbollah sont incluses les activités de blanchiment d’argent et de trafic de drogue dans le monde entier car son réseau dense couvre l’Afrique, l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud. Ceci s’est avéré flagrant dans le lien du Hezbollah avec le prétendu blanchiment de 483 millions de dollars par la Lebanese Canadian Bank et deux maisons de change, avec l’implication de 30 acheteurs d’automobiles américains.
Le financement du Hezbollah crée une relation complexe entre client et représentant. Comme Fanusie et Entz le signalent, le Hezbollah « utilise toute une batterie de sources de revenus, ce qui accroît l’aide iranienne avec ses autres mécanismes de financement complexes, la mise en oeuvre de nombreuses stratégies étant nécessaire pour lutter contre son financement » (Yaya J. Fanusie et Alex Entz, Hezbollah – Financial Assessment, Foundation for the Defence of Democracy, septembre 2017). La majeure partie du financement iranien du Hezbollah provient d’EIKO (Exécution de l’ordre de l’imam Khomeini), un conglomérat d’entreprises qui rend des comptes à l’ayatollah Khamenei. On a découvert que l’Allemagne est un hub financier important pour les activités financières et de soutien du Hezbollah en Europe. Beaucoup sont de l’avis que l’UE devrait inclure l’ensemble du Hezbollah dans la liste des organisations terroristes et non seulement sa branche militaire.
Une autre source de financement des États étrangers à des groupes terroristes takfiri-salafistes provient des États du Golfe, qui apportent un soutien idéologique et financier partout dans le monde. Le rôle de l’Arabie saoudite pour promouvoir son idéologie wahhabite qui est propagée par le biais de fondations de bienfaisance parallèles qui apportent un appui financier généreux à la construction de mosquées wahhabites est bien documenté. Le Qatar et le Koweït ont été aussi accusés de financer l’EI et des groupes djihadistes dans tout le Moyen-Orient et ailleurs dans le monde. Ces tentacules financiers s’étendent dans le monde entier et apparaissent souvent dans le contexte géopolitique plus général de la rivalité entre sunnites et chiites à travers des conflits locaux.
Conclusion
Il est difficile de comprendre le financement du terrorisme car ses mécanismes sont de nature transnationale et couvrent tout un éventail de sources de financement provenant aussi bien de sociétés légales que d’activités illicites. Les terroristes sont souvent extrêmement innovants dans la recherche de nouvelles sources et méthodes de financement pour leurs organisations et leurs missions opérationnelles. Les plus grandes organisations terroristes et les plus complexes sont fréquemment financées par des aides d’État. Étant donné que les terroristes et les délinquants changent constamment leurs façons de collecter, de faire circuler et d’accéder aux fonds, il est essentiel que les agences gouvernementales adaptent leurs réponses. L’identification des liens financiers sont extrêmement utiles pour mieux appréhender les réseaux sociaux terroristes. Les terroristes transfèrent souvent des fonds en utilisant des passeurs de fonds qui acheminent l’argent, à travers des réseaux informels (par exemple, le système hawala), d’entreprises de services financiers, d’institutions bancaires formelles et de marchandises de haute valeur (Michael Freeman et Moyara Ruehsen, « Terrorism Financing Methods: An Overview », Perspectives on Terrorism, Vol 7, No 4 (2013)). Les cellules de renseignement financier doivent identifier l’éventail de systèmes et de méthodes de financement utilisés par les terroristes et les délinquants comme sources de financement. Des mesures fermes contre le blanchiment d’argent et les systèmes de financement du terrorisme sont à la base de ce travail.