La paix est-elle possible?
n.71
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Édito
Au moment de la mise sous presse de ce numéro, début avril, le conflit de Gaza semblait prendre un tournant, même s’il était incertain. Israël, de plus en plus isolé sur la scène internationale et soumis à de fortes pressions internes, a retiré ses troupes du sud de la bande de Gaza, même si, de l’autre côté, le premier ministre Benyamin Nétanyahou a déclaré son intention de poursuivre l’offensive à Rafah. Dans le même temps, les parties sont retournées à la table des négociations en Égypte, avec la médiation du Qatar, mais avec peu de chances de parvenir à un accord.
Quelle est la raison de cette manoeuvre militaire israélienne ? Après six mois de soutien quasi inconditionnel, reconnaissant le droit légitime d’Israël à se défendre après l’attaque du 7 octobre, les États-Unis ont accru la pression sur leur allié, révélant leur impatience croissante face à la conduite de la guerre par Israël et les tensions entre Joe Biden et Benyamin Nétanyahou, alors que le bilan des victimes à Gaza s’élève à plus de 32 000 morts.
Le conflit israélo-palestinien a toujours eu une dimension régionale et mondiale. Les États-Unis vont célébrer leur élection présidentielle en novembre 2024 et, d’ici là, le président Biden sera engagé dans une campagne électorale intense. La base électorale plus jeune du Parti démocrate, mécontente de la gestion du conflit par Biden, a probablement influencé le changement de cap du président, inquiet des sondages qui n’excluent pas un retour de Donald Trump à la Maison Blanche.
D’autre part, l’attaque israélienne contre le consulat iranien à Damas, qui a fait 13 victimes, dont un haut commandant de la force Al Qods du Corps des gardiens de la révolution islamique, illustre la nature régionale du conflit. Par ces attaques, Israël cherche à dégrader les capacités et à dissuader les alliés et les supplétifs de l’Iran qui menacent sa sécurité. Les groupes et les forces régionales qui forment « l’axe de la résistance » soutenu par l’Iran, tels que le Hezbollah au Liban, les Houthis au Yémen, les milices en Irak et en Syrie, et le Hamas, représentent, pour l’instant, la véritable résistance à Israël.
Toutefois, dans cette « guerre entre guerres », où Israël et l’Iran sont les principaux adversaires, ni l’un ni l’autre ne semble vouloir que le conflit aille plus loin. Alors que l’Iran a promis de fortes représailles pour ne pas montrer sa faiblesse, il a également cherché la détente, en faisant pression sur les milices irakiennes pour qu’elles limitent leurs attaques contre les forces américaines, et en menant des négociations indirectes avec Washington, les deux parties cherchant à apaiser les tensions. La capacité de l’Iran à maintenir une confrontation indirecte de faible intensité tout en projetant une image de puissance déterminera largement la reconfiguration de l’ordre régional après la guerre. Toutefois, en cas d’escalade du conflit au niveau régional, nous entrerions en territoire inconnu.
De même, par pragmatisme, les gouvernements des pays arabes en général, pas seulement ceux qui ont normalisé leurs relations avec Israël avec les accords d’Abraham, maintiennent un soutien discret aux Palestiniens. La crainte que la solution du conflit se fasse à leurs dépens, avec un essor des mouvements islamistes comme le Hamas ou un exode important de réfugiés vers les pays voisins, expliquerait qu’ils n’aient pris aucune mesure concrète à l’encontre d’Israël. Et ce, malgré l’indignation de leur opinion publique, qui a cependant peu de chance d’influencer des systèmes politiques plus ou moins autoritaires.
Cependant, ce que la guerre d’Israël à Gaza a fait, c’est creuser le fossé entre ces gouvernements arabes et l’Union européenne. Longtemps considérée comme un « payeur » plutôt qu’un « acteur » dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, l’UE est perçue comme favorable au statu quo et accusée de faire deux poids deux mesures dans les guerres d’Ukraine et de Gaza. Malgré les efforts répétés du chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, tant que l’UE manquera de cohésion politique entre ses États membres et ne proposera pas un plan diplomatique concret pour le lendemain du conflit actuel, elle sera perçue comme un acteur ayant peu d’influence. Cela laisse le champ libre à la Russie et à la Chine, qui cherchent à occuper l’espace politique et économique laissé par les anciennes grandes puissances fortement présentes dans la région, les États-Unis et l’Union européenne./
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