L’islamisme et la politique extérieure américaine

Les USA ne doivent pas forcément soutenir les valeurs des islamistes, mais doivent veiller à la qualité des processus politiques auxquels ils participent dans l’intérêt d’une véritable démocratie.

Peter Mandaville

Apparemment, les révoltes arabes de 2010-2011 ont engendré de nombreux problèmes à la politique américaine au Proche-Orient. Le premier et le principal problème a été celui de la disparition de différents régimes – en particulier ceux d’Égypte, du Yémen et de la Tunisie – dont les leaders avaient suivi rigoureusement les priorités stratégiques des États-Unis dans la région. Et quand il fut clair que les principaux bénéficiaires des nouvelles réalités politiques régionales seraient divers partis et mouvements islamistes, Washington s’est trouvé devant un autre dilemme. L’opinion générale portait à croire qu’il existait aux USA un profond désaccord avec ces groupes. Pour certains observateurs, le pays était un ennemi idéologique de l’islamisme, tandis que d’autres attribuaient cette attitude à la crainte perpétuelle de Washington que même les islamistes majoritaires – ceux qui avaient décidé de participer au processus démocratique – avaient des programmes cachés qui iraient, en dernier ressort, à l’encontre des intérêts sécuritaires américains. Dans certains cas, les États-Unis ont été complices des efforts de leurs satellites dans la région dans la suppression et la criminalisation des islamistes, ou tout au moins, ils avaient fermé les yeux. En conséquence, quand ces groupes ont commencé, en 2011, à acquérir une prépondérance dans les politiques de transition du monde arabe, on a eu l’impression que Washington se trouvait dans une impasse.

Quelques années plus tard, la situation semble s’être inversée. Dans toute la région, les partis islamistes ont été expulsés du pouvoir, comme en Égypte. Ils ont été désavantagés sur le plan politique, comme en Tunisie, ou bien ils sont devenus des forces profondément conflictuelles au sein de la société, comme dans le cas de la Libye. Même si les États-Unis doivent faire face à l’heure actuelle, à un défi renouvelé de la part des islamistes violents, tels que le groupe de l’État islamique et les filiales d’Al Qaida en Syrie, le caractère de ces groupes est très différent de celui des différents partis islamistes qui ont décidé d’opter pour des élections et une participation politique. Comment les USA ont-ils géré la montée impressionnante et la chute tout aussi spectaculaire des acteurs politiques islamistes depuis 2011 ? Peut-on identifier un changement dans la politique américaine à l’égard de ces groupes ? Compte tenu des évènements récents, quelle stratégie va adopter à l’avenir Washington en matière de relations avec les islamistes?

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