Il y a des mots qui brûlent. Islamophobie en est un. On a souvent recours à l’euphémisme pour l’éviter : racisme et discrimination servent en général de substituts. Mais le racisme est l’une des causes de l’islamophobie, et la discrimination sa conséquence. Ainsi, de pair avec le silence, l’islamophobie suit son cours sans qu’y couper court ne devienne une priorité politique européenne. La violence qui a éclaté dans les banlieues suédoises en mai ou lesdits « loups solitaires » des attentats de Londres et de Paris ont à nouveau fait sauter le signal d’alarme et, encore une fois, les discours sur la haine accumulée et l’échec des politiques d’intégration européennes se succèdent. D’un autre côté, les réactions européennes face aux mobilisations anti-Erdogan et au coup d’État anti-Morsi ont canalisé le rejet latent de l’islamisme, que l’on ne ressent pas comme une option politique légitime. L’on a pris soin de tout bien assaisonner avec l’argument sécuritaire. Lorsque l’on analyse toute cette situation, le mal sous-jacent, l’islamophobie, n’est jamais mentionné.

Appeler les choses par leur nom

Appelerleschosesparleurnom,cen’estpascho- se facile, évidemment, lorsque le nom n’existe pas officiellement, comme c’est le cas d’ « islamo- phobie » en espagnol. L’organisme qui régit l’officialité linguistique, la Real Academia Española, ne l’inclut pas dans son dictionnaire. De façon curieuse, la présentation numérique de la 23ème édition du DRAE signale, lorsque l’on cherche le terme « islamophobie », qu’une entrée à l’orthographe similaire est… hispanophobie ! Mais Google est là, à mi-chemin entre le reflet et la création de réali- tés. Le moteur de recherche sur internet présente 742 000 résultats pour « islamophobie » (pour compléter l’analo- gie, il n’en présente que 23 000 pour « hispanophobie »). Ainsi donc, nous devrions nous demander qu’est-ce que l’islamophobie et pourquoi ce terme est escamoté.

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