Pour répondre correctement à cette question il est nécessaire de définir le paysage intellectuel musulman effectif, écartant tout « cheminement souterrain » et toute «sympathie secrète » auxquels des grands noms de l’orientalisme ont cru pouvoir s’attacher. Cette étude menée tant au niveau de l’ensemble de l’Espagne musulmane qu’à celui des seules Baléares, qu’à celui enfin des points d’Afrique du Nord que Llull a fréquentés,1 permet de mettre en évidence un certain nombre de composantes :
- Les exigences rationalistes de la polémique des auteurs musulmans à la fois à l’intérieur de l’islam et contre les chrétiens.
- La confluence, en ce sens, des principaux courants théologiques qui se sont manifestés dans al-Andalus : l’ash‘arisme et le zâhirisme, et ce malgré une opposition irréductible entre eux.
- Le rôle de ferment intellectuel joué par l’idéologie almohade, malgré le très court temps de présence du régime politique correspondant dans les Baléares.
- La présence d’éléments néoplatoniciens diffus dans des tendances et des milieux très divers.
- Une réelle prégnance d’éléments ésotériques, par le biais du soufisme mais aussi par celui de mécanismes mentaux de type divinatoire, en même temps que la possibilité d’intégrer ceux-ci dans une vision rationnelle par l’invocation de l’idée de « machine à penser ».2
Il est donc possible, sur cette base, de mener une enquête documentée et d’éviter les spéculations gratuites qui ont empoisonné le sujet. Encore aujourd’hui, en effet, certains écrits concernant Llull et l’islam sont entachés d’une grande part d’arbitraire.3 En revanche, le point central de la démarche des premiers chercheurs, J. Ribera et M. Asin Palacios reste intact, à savoir le fait que Llull connaissait mal le latin (il devait se faire aider pour ses traductions et, malgré cela, nous avons des exemples de fautes commises par lui-même), alors qu’il avait consacré neuf ans à l’apprentissage de l’arabe et qu’un témoignage du XIVe siècle – qu’il n’y a pas de raison de suspecter sur ce point – vante notamment la qualité de sa calligraphie dans cette langue.4 Il était donc logique de chercher au moins autant, sinon plus, du côté de cette langue et de sa civilisation que du côté de la scolastique latine pour comprendre sa pensée.
Qu’en est-il des textes mêmes de Llull ? Les « citations » faites par lui d’écrits arabo-islamiques consistent d’une part en son adaptation de la Logica Algazelis,5 de l’autre dans le conseil donné aux missionnaires (Liber de Fine, 1305) de lire, outre son propre Libre del Gentil, dont une première version a été faite en langue arabe, l’Apologie du chrétien oriental al-Kindî (Xe s.), bien diffusée en Espagne musulmane, et un ouvrage maghrébin de polémique issue du conflit entre le mouvement almohade et le mâlikisme traditionnel (XIIe s.), ouvrage connu sous le nom de Contrarietas alfolica (alfolica = al-fuqahâ’).6 On peut penser, à propos des deux dernières références, qu’il ne s’agit pas seulement d’instruments proposés, mais qu’il y a bien eu une influence doctrinale de ces textes sur Llull, car celui-ci, durant une brève période, renoue avec la tradition ancienne de la polémique par autorités, sans doute sous l’influence de milieux mozarabes contemporains, ce qui l’éloigne de sa méthode propre.7 Il s’agit donc plutôt là d’une influence négative.
Pour ce qui est de l’adaptation du texte de Ghazâlî, la version latine lullienne témoigne d’une assez grande indépendance dans l’ordre des concepts et contient des éléments extérieurs qui peuvent venir de Pedro Hispano, mais se rattache néanmoins pour l’essentiel à l’original arabe et non à la traduction latine de Gundisalvi dont elle évite les erreurs, bien que l’auteur, par ailleurs, « semble avoir travaillé très vite, non comme un savant investigateur, mais comme quelqu’un qui vise un but très précis ».8 Ce qui a fait opter Ch. Lohr pour l’idée d’une élaboration en cinq étapes : 1. un premier travail de compilation en arabe, fait par Llull d’après les Maqâçid al-falâsifa d’al-Ghazâlî; 2. une traduction latine de ce premier travail ; 3. des emprunts à Pedro Hispano, sans doute faits à Montpellier en 1289-1290, changeant la structure de l’oeuvre mais non la conception fondamentale ; 4. la forme actuellement connue, correspondant à l’état précédent auquel sont ajoutés des développements théologiques; 5. la traduction versifiée catalane dans laquelle les additions théologiques et philosophiques sont désormais au centre.
Mais quelle est la portée de cette adaptation ? Il n’y a pas de différence, à cette époque, entre les logiques arabe et latine et l’aspect propre du lullisme, à savoir la recherche de rationes necessariae, n’est pas directement concerné. C’est seulement sur les points particuliers que sont le problème des faux arguments et la conception des Prédicables et des Catégories comme méthode d’élévation pour l’entendement, qu’il faut se référer plus précisément au modèle de Ghazâlî pour comprendre Llull.9
Dans le même domaine, on constate que l’oeuvre tardive de Llull, de l’Ars inventiva (1289-1290) à l’Ars generalis ultima (1308), évolue en intégrant des éléments dont l’origine est manifestement dans l’oeuvre presque contemporaine d’Ibn Sab‘în, le Budd al-‘ârif.10Cela est remarquable car l’étude de la situation intellectuelle dans les points du Maghreb où Llull a séjourné montre que, tout en restant marginal, le mouvement d’Ibn Sab‘în a eu un réel impact. Nous allons donc ici plus loin que dans le cas précédent : l’écrit de Ghazâlî a pu être connu par Llull directement, par les musulmans de Majorque, mais il était assez répandu pour que ce soit seulement sous l’influence du clergé romain qu’il ait éprouvé le besoin de revenir à l’original arabe, lequel lui était plus accessible que la traduction latine de Gundisalvi. Pour Ibn Sab‘în, rien de tel : seul le contact personnel avec des disciples peut expliquer le choix d’un auteur dont l’audience était si particulière.
On trouve, tant chez Ibn Sab’în que chez Lulle, l’idée que théologie et philosophie sont liées, et non pas dans un rapport de subordination entre elles
Or il est incontestable qu’à partir de 1303 Llull intègre définitivement dans son effort pour constituer une Logica nova les principaux éléments de celle d’Ibn Sab‘în :
- Il veut constituer une logique « philosophique », et non pas seulement technique. Il vise une théorie de la connaissance, et non pas seulement des règles pour raisonner correctement. Enfin, il veut atteindre une connaissance « naturelle », non seulement des secondes intentions mais aussi des premières intentions.
- Il s’appuie sur une liste de neuf « sujets », allant de Dieu aux choses instrumentales, qui est établie selon les critères d’Ibn Sab‘în, bien que les désignations ne soient pas toutes les mêmes. Comme l’auteur arabe, également, il décrit comment l’intellect peut s’élever, par les divers sujets, jusqu’à Dieu et redescendre au particulier.
- Il détaille les « questions» en neuf, soit plus qu’Aristote et les scolastiques, mais comme Ibn Sab‘în, et ne modifie la liste de celui-ci que sur deux points qui s’expliquent par les remarques de l’auteur musulman concernant leur possibilité d’application à Dieu.
- Il consacre toute une section à donner un dictionnaire de cent termes, ce qui correspond à l’approche lexicographique qu’Ibn Sab‘în fait de la « science » (et qui chez lui remplace l’étude aristotélicienne de la démonstration).
- Il classe les types de proposition en fonction de leur force probative, comme l’avait fait Avicenne, ce qui est un élément particulier qu’Ibn Sab‘în a emprunté à celui-ci pour compléter la logique des Frères de la Pureté, qui l’ignoraient. L’idée de base d’Avicenne étant de séparer l’argumentation théologique de celle – dialectique – des juristes en lui imposant la méthode syllogistique, on trouve, tant chez Ibn Sab‘în que chez Llull, l’idée que théologie et philosophie sont liées, et non pas dans un rapport de subordination entre elles.
Par la suite, la démarche des deux auteurs diverge, mais on peut constater que la logique d’Ibn Sab‘în et celle de Llull sont essentiellement des instruments d’unification mystique. Cependant l’application de cette démarche unifiante est différente chez l’un et chez l’autre. Aussi peut-on en conclure que l’emprunt textuel (non avoué cette fois-ci !), pour important qu’il soit dans l’oeuvre de Llull, ne dépasse guère le niveau de l’instrumental et ne s’élève pas à celui des questions fondamentales.
Si donc les références textuelles sont insuffisantes, ne peut-on, pour expliquer ce qui fait la spécificité de la perspective lullienne, se tourner vers les invocations que fait notre penseur de modèles généraux empruntés à l’islam ? Dès 1899, J. Ribera a attribué une grande importance à la formule du Blaquerna invoquant les expressions et les pratiques des soufis.11 En fait, cette formule répond à d’autres formules en sens inverse, comme l’invocation par certains soufis de symboles chrétiens tels que le calice, le monastère, etc. 12 Elle n’a donc qu’une portée poétique, et non pas doctrinale.
Sur l’hypothèse de son maître, M. Asin Palacios a greffé une comparaison avec l’oeuvre du plus célèbre mystique de l’Espagne musulmane, Ibn ‘Arabî. 13 Cette comparaison a été réfutée par nombre de lullistes. Les similitudes, en effet, sont indéniables, mais ne sont pas caractéristiques d’ Ibn ‘Arabî, et Llull a pu en trouver les racines dans la tradition majorquine, même non mystique. Ainsi, Asin a proposé de rapprocher, chez les deux auteurs, des thèmes qui ne leur sont pas propres : l’exemple du « goût malade» appartient à l’argumentation de toutes les époques ; le symbole de la lumière et même l’allégorie des deux lumières se retrouvent dans la plupart des pensées qui laissent une part à l’illumination divine ; la personnification allégorique d’idées est universelle ; etc. La théorie de la matière spirituelle et de la pluralité des formes a plus de chances de venir des œuvres d’ Ibn Gabirol lui-même, qui étaient rédigées en arabe. L’idée que nous connaissons Dieu mais ne le comprenons pas est exprimée avec force tant par Ibn Hazm au XIe siècle que par le mahdî almohade Ibn Tûmart au début du XIIe. Enfin le rapprochement entre les mots hadra et dignitas relève de la terminologie, ce qui évacue tout le contenu propre à l’ésotérisme d’ Ibn ‘Arabî. Toutefois, dans un livre qui n’était pas encore édité à l’époque d’Asin Palacios, le Liber Chaos, qui date d’environ 1285, où le dynamisme créé du chaos est compris comme la manifestation du divin, on peut déceler une certaine relation non seulement avec Ibn Sab‘în, mais aussi avec Ibn’Arabî.14
La question des Cent noms de Déu (1285) est plus complexe. Dans l’ouvrage qui porte ce nom, Llull se réfère à la tradition musulmane qui affirme que, par-delà les quatre vingt dix neuf noms connus (dont l’énumération peut d’ailleurs varier ici ou là, ce qui conduit à près de cent trente noms en fait), celui-ci découvrirait le centième atteindrait l’essence divine. Il prétend relever le défi et en même temps donner un texte qui puisse être chanté et ainsi rivaliser avec les psalmodies musulmanes. Cette prétention a bien évidemment choqué les musulmans, mais les Lullistes aussi ne l’ont pas prise au sérieux, étant donné toutes les modifications introduites par Llull dans cette liste des noms divins. De fait si l’on s’en tient à la constatation de ce que les concordances ne semblent guère aller au-delà de la cinquantaine, on peut croire que Llull n’a pas dépassé le stade de l’extériorité du rite ou de la pure pratique.15
Mais une étude plus approfondie montre qu’il y a une logique de la modification apportée par notre auteur et que la partie musulmane reste accessible. D’une part on peut aller plus loin que la remarque précédente : vingt-huit termes lulliens sont une traduction exacte des termes islamiques, mais cinquante-neuf noms lulliens correspondent à soixante noms musulmans si l’on tient compte des synonymies, des variantes dans l’interprétation ou des sens allégoriques communément admis. D’autre part, il faut prendre en considération le fait que le théologien musulman dont l’oeuvre a été la plus utilisée en Espagne, l’ash‘arite Juwaynî (XIe s.), n’a étudié dans son Kitâb al-irshâd que quatre-vingt noms, et les termes qu’il délaisse sont, à trois exceptions près, les mêmes que ceux que Llull ignore, à savoir ceux qui concernent les rapports de Dieu à ses créatures (péché, grâce,…), pour les remplacer par des termes propres au christianisme ou à son Art. Bien plus, malgré les transformations apportées, la liste lullienne conserve la même répartition que dans la théologie ash‘arite : l’essence de Dieu, ses actes, ses attributs éternels.16
Dans l’ouvrage Cent noms de Dieu, Lulle se réfère à la tradition musulmane qui affirme que, par-delà les quatre-vingt-dix-neuf noms connus, celui qui découvrirait le centième atteindrait l’essence divine
Toutefois, il faut aussitôt remarquer que l’oeuvre prend son départ ici, où s’arrête à celle du musulman. Notre Majorquin se place donc sur un terrain admis, mais il ne se soucie pas vraiment d’élaboration des idées transmises. Il est vrai que la plus grande partie de l’histoire de la philosophie concerne, traditionnellement, les problèmes d’héritage de notions et le remodelage de celles-ci dans le prolongement ou au contraire en opposition avec les oeuvres précédentes. Mais ce serait considérablement appauvrir le domaine de la pensée que de l’envisager uniquement à l’intérieur de textes écrits. On a répété à satiété que Llull n’était pas un universitaire. À la différence de Ramon Marti, qui connaît de nombreux textes musulmans et les utilise avec précision, Llull – nous l’avons vu – ne se soucie pas d’exactitude scolaire. Même quand il exploite un texte qu’il désigne nommément, il en fait ce qu’il veut. À plus forte raison, dans ce monde de confrontation charnelle qui est le sien, faut-il tenir compte des idées verbalement transmises, des objections liées à des attitudes d’esprit et non à des traités en forme, en un mot il faut tenir compte des mentalités.
Il est donc impératif de prolonger l’étude des textes par une mise en situation. Llull n’a pas eu affaire tant à des livres qui circulaient qu’à des êtres vivants, des obédiences idéologiques. Si l’on prend cette perspective, on voit nettement chez lui la trace des mouvements et des évolutions du monde musulman de son temps. En voici quelques exemples.
On peut parler d’un véritable soubassement kalâmique (le mot Kalâm désignant la forme particulière de théologie musulmane) de l’action intellectuelle de Llull. L’examen des Cent noms de Déu vient de le montrer, alors même que ce livre fait référence explicite à une tradition populaire et non à une discipline d’école : en fait l’influence de la tradition populaire s’avère superficielle, alors que l’impact de la discipline d’école est de beaucoup plus grand poids. D’une part la présence de mutakallimûn (spécialistes du Kalâm) est attestée à Majorque au moins jusqu’à sa conquête ; d’autre part la situation dans l’île au XIIIe siècle, avec ses confrontations non seulement entre religions mais aussi entre l’Eglise catholique dominante et des mouvements scissionnistes divers, correspond au climat intellectuel des IIe-IIIe siècles de l’Hégire où le Kalâm s’est formé pour « justifier » rationnellement la révélation musulmane.
Dans cette perspective, deux aspects fondamentaux de l’œuvre lullienne s’expliquent. La volonté de rechercher des rationes necessariae, sans pour autant que la raison empiète sur la foi, est certes rattachable à l’école de Saint Anselme ; mais on comprend mieux le choix de cette démarche – qui n’était pas une chose allant de soi -par un personnage situé lui-même hors de tout contexte scolastique et connaissant assez mal le latin, si on tient compte du fait qu’elle correspondait à l’état d’esprit des interlocuteurs musulmans de Llull. Quant au rôle fondamental, chez ce dernier, de l’analogie, il correspond en outre à la thèse centrale de la pensée ash‘arite. Sans doute ne saura-t-on jamais lequel des deux éléments, le latin ou l’arabe, a été le plus déterminant, mais il est important de constater cette coïncidence dans la mesure où elle justifie l’entreprise lullienne.
À quoi il faut s’empresser d’ajouter que Llull agit avec désinvolture vis-à-vis de cette base commune entre lui et son interlocuteur. Dans le Libre de contemplacio, alors qu’il vient de reprendre – consciemment ou non ? – les analyses de l’école de Juwaynî sur la classification des attributs divins, il signale juste par un mot, sans s’y arrêter, que « celui qui veut avoir l’art et la manière de l’oraison intellectuelle, qu’il sache s’élever à elle par l’exposition morale, que l’on appelle en arabe ramz, c’est-à-dire exposition morale, allégorie ou analogie …».17 Comme dans les Cent noms de Déu, ce que les théologiens musulmans ont longuement élaboré, et à quoi ils se sont limités, est repris d’un simple mot ou allusion, pour servir de tremplin vers autre chose, qui est l’Art.
Lulle n’était pas un universitaire. Lulle ne se soucie pas d’exactitude scolaire. Même quand il exploite un texte qu’il désigne nommément, il en fait ce qu’il veut
Mais cette recherche d’un terrain admis permet de comprendre certaines évolutions dans la démarche de notre auteur. La preuve de l’existence de Dieu n’est pas la même entre le Libre de contemplacio, qui passe pour la première oeuvre de Llull, et le Libre del gentil, soit entre deux textes qui se présentent comme ayant eu chacun un antécédent en arabe. On sait que Saint Anselme a commencé par une simple radicalisation de l’argument ex gradibus (l’idée du quo nihil majus cogitari possit) et que, sous la critique de Gaunilon, il a reformulé son argument, tablant non sur la comparaison mais sur l’idée même d’Être nécessaire. Or si cette dernière forme est celles dont se rapproche le Libre de contemplacio, c’est à la première forme que revient le Libre del gentil avec la démarche suivante :
Esse in intellectu (Saint Anselme) significacio (Llull)
Esse in re « demonstracio «
On ne peut comprendre ce retour en arrière que si l’on se réfère à l’évolution connue de son côté par la pensée arabo-andalouse. Le mahdî almohade, Ibn Tûmart, dont la doctrine a d’abord servi de support idéologique à l’empire de même nom, faisait reposer son analyse théologique sur les seules exigences de la raison, sans référence aux données du monde concret, et s’appuyait tout naturellement, dans sa « Profession de foi» sur l’idée d’Etre nécessaire. Mais par la suite tel de ses disciples comme Averroès, dans ses œuvres philosophico-théologiques propres (Façl al-maqâl, Kashf ‘an manâhij, et Tahâfut al-tahâfut) avait adopté une attitude moyenne et était revenu à l’idée de comparaison, se rapprochant ainsi des Ash‘arites qu’il combattait pourtant part ailleurs. Sa démarche a pu être diffusée à Majorque par son disciple Ibn Hawt Allâh, le dernier grand intellectuel des Baléares musulmanes. Si Llull a fait le chemin inverse de Saint Anselme ce serait donc parce que, comme il le dit lui-même dans le Libre del gentil, « comme j’ai fréquenté longtemps les infidèles et que j’ai entendu leurs opinions fausses et leurs erreurs (…), je veux(…) aborder une nouvelle manière et de nouvelles raisons …».18 Manière prudente de dire qu’il s’adapte à eux et à leurs fluctuations doctrinales.
Un deuxième exemple d’adoption, par Lulle, d’idées qui sont « dans l’air », sans que l’on puisse parler d’emprunt textuel, est donné par l’utilisation de certains vocables impliquant une perspective particulière
Un deuxième exemple d’adoption, par Llull, d’idées qui sont « dans l’air », sans que l’on puisse parler d’emprunt textuel, est donné par l’utilisation de certains vocables impliquant une perspective particulière. Llull est vraisemblablement le premier à utiliser le terme « théologie positive», et d’autre part il emploie le concept des « deux intentions » dans un sens très différent des scolastiques. Cela s’explique si l’on remonte aux Épîtres des Frères de la Pureté,19encyclopédie d’inspiration ismaélienne du Xe siècle, qui s’est répandue en milieu sunnite jusqu’au XIVe siècle, à cause de son caractère de vulgarisation. On sait par ailleurs qu’elle a eu des répercussions, soit directement par sa diffusion dans le nord-est de l’Espagne musulmane, soit par l’intermédiaire de personnages comme Ibn Sab‘în dans l’islam, soit dans le judaïsme lettré, soit enfin même dans le christianisme par certains milieux hétérodoxes comme les Spirituels. Cette encyclopédie syncrétique théorise, entre autres, la distinction qui s’est faite progressivement dans le domaine du Kalâm entre ce qui relève de la raison (‘aqliyât) et ce qui relève de la tradition (sam‘iyât). Elle tend à rejeter la première catégorie du côté de la philosophie, et définit la seconde catégorie comme « sciences positives de la Loi religieuse » (al-‘ulûm al-shar‘iyat al-wad‘iya). Il y a ainsi rupture avec la division aristotélicienne entre spéculatif et pratique, division qui est maintenue, en revanche, chez les adeptes arabes de la philosophie grecque (Falâsifa). En parlant de « théologie positive », qu’il rattache à la volonté, Llull se situe dans le prolongement de l’apologétique musulmane.
De même pour l’idée des « deux intentions », Llull se rapproche des Falâsifa pour qui la seconde intention est la matière et le sujet de la logique, mais surtout il reprend textuellement la définition des Frères de la Pureté faisant de l’intention première la « causalité procédant de Dieu » et de l’intention seconde la « causalité procédant de la déficience des créatures ». Cette définition avait déjà été reprise par Ibn Sab‘în, chez qui Llull a pu la trouver avec les éléments déjà signalés.
Un troisième exemple est celui, précisément, du choix par Llull, parmi les mystiques musulmans, d’Ibn Sab‘în qui est, comme lui, à la fois philosophe et mystique. Avec les neuf sujets et les neuf questions, ce ne sont pas seulement des éléments philosophiques techniques que Llull lui emprunte, mais bien des mécanismes d’élévation de l’esprit, dont on retrouve la trace en particulier dans la démarche d’ascensio intellectus. En outre, dans la Disputatio Raimundi et Hamar sarraceni, apparaissent deux expressions caractéristiques : 1. Llull annonce qu’il veut montrer que les qualités (en arabe çifât), invoquées par son interlocuteur, sont de véritables dignitates (en arabe hadrât) ; c’est-à-dire qu’il veut infléchir le Kalâm vers le soufisme, chacun des deux mots étant caractéristique des vocabulaires techniques respectifs. 2. Il emploie le terme même arabe de wujûd mutlaq (existence absolue = Être nécessaire), qui est caractéristique de l’enseignement d’Ibn Sab‘în.20
On peut se demander pourquoi Llull qui, en théologie, cherche à se rapprocher de la voie la plus commune, est attiré en mystique par un auteur certes important mais à l’audience sulfureuse. Ici plus qu’ailleurs on est réduit aux conjectures. Si l’on tient compte de l’évolution particulière de notre auteur sur le plan poétique et son brusque saut de la poésie sensuelle à la poésie religieuse, très différente de la pénible adaptation des troubadours tardifs dans leurs hymnes à la Vierge, on fait le rapprochement avec l’oeuvre de Shushtarî, principal disciple d’Ibn Sab‘în en même temps qu’éminent poète mystique, capable d’utiliser en les transfigurant les thèmes charnels. Ont dû alors intervenir des facteurs culturels annexes comme la musique pour expliquer la transmission de cet éthos.21 Ce dernier point reste cependant beaucoup plus conjectural que pour le Kalâm. Celui-ci explique la tonalité de l’oeuvre dès son début. La présence du courant sab‘îniyen explique les modifications techniques de l’oeuvre tardive, attestées par le vocabulaire même, mais il est difficile de les rattacher avec certitude à une mentalité préexistant chez l’auteur dès le début de son action.
Un dernier exemple, qui nous éloigne encore davantage du domaine des «textes », mais qui est beaucoup plus sûr que le précédent puisque Llull le souligne lui-même, est la doctrine des « corrélatifs ». Celle-ci est une trouvaille intéressante puisqu’elle se place sur le plan rationnel tout en faisant intervenir des mécanismes particulièrement adaptés à la langue arabe, avec la souplesse très grande de la diversité des formes verbales, où dominent néanmoins le nom d’action (maçdar), le participe actif désignant l’agent (fâ‘il) et le participe passif indiquant le patient (maf‘ûl).
Certes ce thème existait déjà auparavant. Dans le De Trinitate Saint Augustin exploite la triade amans – quod amatur – amor, reconnaissant que c’est une image imparfaite, mais du moins une « image » de la Réalité Suprême. Le Liber de causis, dérivé de Proclus mais attribué par erreur à Aristote et très diffusé dans le monde arabe, affirme pour sa part que l’Intellect est à la fois Intelligent et Intelligé. C’est cette dernière filière qui sera la plus féconde. Al-Fârâbî, au Xe siècle, en tire explicitement la définition de Dieu comme « Intellect – Intelligent – Intelligé », triade qui est reprise par des penseurs musulmans orientaux des Xe-XIe siècles et par des auteurs juifs occidentaux des XIIIe-XIVe siècles, ainsi que par Ibn Sab‘în et ses disciples. Toutefois, dès auparavant, des penseurs chrétiens arabes avaient exploité cette veine dans le sens religieux, et ce indépendamment de Saint Augustin. On a un témoignage indirect de ce que les Nestoriens avaient, au plus tard au Xe siècle, développé la triade « Science – Savant – Su ». Le Jacobite Yahyâ ibn ‘Adî fait la synthèse entre ce courant et Fârâbî, dont il est le principal disciple, et le thème se répand dans toutes les Églises d’Orient jusqu’au XIIIe siècle.22
Llull n’a sans doute pas connu les textes mêmes de ces auteurs arabes chrétiens, mais il a pu en avoir des échos par les réfutations que, très tôt, les auteurs musulmans en font. Il a pu également en entendre parler dans les milieux juifs qu’il a fréquentés, ou chez les hétérodoxes chrétiens, plus ou moins influencés par Ibn Sab‘în et Shushtarî. Peut-être, tout simplement, cette idée lui a-t-elle été suggérée par sa pratique de la langue arabe et du dialogue avec l’islam, comme d’autres aspects de la confrontation avec celui-ci (tels que la démarche irénique, la mise en avant de «thèmes différentiels», le développement d’une argumentation rationnelle, etc.) se trouvent déjà mis en pratique par plusieurs auteurs orientaux avant même notre personnage.
La doctrine des « corrélatifs » est une trouvaille intéressante puisqu’elle se place sur le plan rationnel tout en faisant intervenir des mécanismes particulièrement adaptés à la langue arabe, avec la souplesse très grande de la diversité des formes verbales
La doctrine des corrélatifs est d’abord, chez Llull, spontanée et tâtonnante. Mais dès le Compendium seu commentum Artis demonstrativae (écrit à Paris en 1288-1289), elle est pleinement consciente et explicite, Llull revendiquant pour les chrétiens « ipsum modum loquendi arabicum, ut infidelium oppositionibus obsistere noscant ».23
Quel que soit le motif d’adoption, par Llull, de cette démarche, elle est extrêmement importante puisqu’elle consiste explicitement en une adhésion à une forme d’esprit, non en un emprunt textuel à tel ou tel auteur. C’est ce qui me paraît justifier la méthode suivie dans ce qui précède.
Peut-être l’historien de la philosophie sera-t-il déçu par ces remarques. Il objectera que les emprunts techniques et conceptuels font apparaître un acquis, et donc une progression dans l’histoire. Alors que la recherche d’un terrain commun ne s’inscrit pas dans cette vision évolutive. On peut répondre que c’est déjà quelque chose d’important de saisir pourquoi Llull a choisi telle ou telle perspective, telle ou telle stratégie, et que si cela ne rend pas compte de toute sa pensée, cela nous fait comprendre qu’une oeuvre philosophique ne tombe pas du ciel par hasard ou caprice. Il me paraît, à la limite, plus important de savoir pourquoi tel penseur argumente de telle façon que de gloser à l’infini sur des détails infimes comme le font beaucoup d’ «artistes du concept ».
Mais on peut aller plus loin et montrer que cette volonté d’avoir prise sur l’interlocuteur par la mise en évidence de présupposés communs peut être féconde. On peut en prendre pour exemple l’aspect le plus célèbre, et le plus frappant à première vue, de l’œuvre lullienne, à savoir la combinatoire et sa représentation graphique. Il est vrai qu’il n’est pas essentiel à sa pensée et que nombre de textes lulliens n’en font pas usage. Mais il est aussi ce qui a le plus frappé la postérité. Or cet aspect n’a pratiquement pas d’antécédent en Occident alors qu’il existe dans le monde arabo-musulman une importante production qui non seulement s’en rapproche graphiquement parlant, mais peut être décrit comme une évolution de la combinatoire qualitative des Grecs et surtout d’Aristote, vers une combinatoire quantitative.24 les modes de formation du réel par combinaison d’éléments plus simples, admis par la plupart des Grecs, sont théorisés par Aristote en quatre procédures essentiellement qualitatives (la permutation, le mélange mécanique, la combinaison chimique et la solution). Le monde arabe les traduit en insistant sur la combinaison chimique et en favorisant la manipulation. L’alchimie s’empare de cela et l’amalgame à la technique sémitique des combinaisons de lettres (censées exprimer la création), aboutissant aux représentations par « cases ». L’idée d’un privilège du mouvement circulaire amène à mettre en avant des représentations par cercles qui, progressivement, évoluent de la représentation de « domaines » de l’être à celle de « place en vue d’une mise en correspondance avec d’autres éléments du même cercle ou d’un autre cercle concentrique ».
Llull n’a qu’à reprendre ces procédés et l’on trouve chez lui les figures circulaires comportant des symboles littéraux, des attributs divins, les éléments et les qualités naturelles, voire dans certains cas les signes du zodiaque, les planètes, les éléments du corps humain, etc. ; les figures quadrangulaires (appelées camerae) avec combinaison des symboles littéraux par permutation, répartition triangulaire, etc; même des représentations en forme de main. Toutefois il les réinterprète radicalement, essentiellement par une simple « répartition » des fonctions de la figure circulaire. Là où celle-ci représentait, chez les auteurs arabes, une simple trajectoire des êtres ou de l’esprit revenant à son origine, elle est éliminée au profit d’une formule telle que ascensus et descensus intellectus. Là où elle représentait un domaine de l’être, elle est tantôt supprimée au profit d’une notation spécifique dans les camerae, tantôt maintenue mais en des figures séparées comme le « cercle du vrai » ou le « cercle du faux ». Ces deux cercles ne jouent qu’un rôle « imaginatif » car c’est sous leur symbolisation littérale (respectivement Y et Z) qu’ils interviennent au cours des «questions », que celles-ci soient explicites dans le texte ou résumées dans les camerae. Là, enfin, où la représentation circulaire arabe servait à établir des correspondances (prolongement de l’image de la rotation de la sphère du monde, génératrice de mixtion), Llull la sépare en deux figures distinctes :
a. Un cercle autour duquel sont répartis les concepts en question, qui sont réunis les uns aux autres par des sécantes, soit en totalité (fig. A, de Dieu et de ses attributs), soit sélectivement en fonction des seuls accouplements possibles (fig. V, des vices et des vertus, et X, des opposés). Ce type de cercle est qualifié de figure « patiente ».
b. Des cercles, simples ou concentriques, répartis en sections par des rayons, les sections étant mises en relation les urnes avec les autres par des triangles (relation trois par trois) ou par des carrés (relation quatre par quatre) inscrits, pivotant autour du centre. Ils sont qualifiés de figures « agentes ». Llull y reprend les éléments de comparaison de la « composition » (tarkîb) ésotérique arabe : préférence, antériorité, convenance, contrariété…, les orchestrant et les amplifiant.
Or, si nous prenons le fait même de la combinatoire moderne, nous constatons que ce procédé, qui est à la base des techniques d’informatique, trouve, de l’avis de tous les historiens des sciences, sa source dans une oeuvre de jeunesse de Leibniz, la Dissertatio de arte combinatoria, de 1666. Plus tard le penseur allemand a fait lui-même l’historique de sa recherche, reprenant à son compte l’idée lullienne d’ars inveniendi. Il se réfère finalement à l’Ars magna de Llull qu’il connaît indirectement, à travers le languedocien Lavinheta (XVIe siècle). S’il montre mathématiquement que ses prédécesseurs, travaillant empiriquement, n’ont pas su constituer toutes les formes possibles de combinaison de symboles littéraux, son travail n’est pas de remise en cause mais seulement d’achèvement.25 Il paraît ainsi convenable de définir une évolution allant de la combinatoire qualitative d’Aristote à la combinatoire quantitative moderne à travers trois seuils : la fusion, par les Arabes, de la première avec la sîmiyâ’ (jeux de lettres) sémitique ; la rationalisation, par Llull, des procédés ésotériques arabes ; la mathématisation complète par Leibniz.
Il paraît ainsi convenable de définir une évolution allant de la combinatoire qualitative d’Aristote à la combinatoire quantitative moderne à travers trois seuils : la fusion, la rationalisation, la mathématisation complète par Leibniz
Le tableau que je viens d’esquisser montre que l’attitude de Llull vis-à-vis de la pensée arabo-islamique est paradoxale. Quand il se réclame ouvertement de modèles, on s’aperçoit que leur impact est en fait superficiel. Llull n’est pas un soufi chrétien, même s’il vante les shatahât (expressions d’extase) des soufis ; il ne se situe pas dans la perspective musulmane ordinaire envers les Noms divins, avec sa connotation ésotérique de révélation privilégiée ; il n’est pas un disciple de Ghazâlî ; et même on peut dire que quand il suit ouvertement l’exemple des Mozarabes, cela le met en contradiction avec l’aspect principal de son Art. En revanche on voit, tout au long de son œuvre, nombre de coïncidences non avouées avec des positions arabo- islamiques, coïncidences qui ne peuvent pas être dues au hasard : la classification des Noms divin selon le modèle ash‘arite ; les « sujets » et les « questions » d’Ibn Sab‘în ; les procédés combinatoires qu’il se contente de rationaliser par une distribution des rôles des figures. On a vu également qu’il pouvait évoluer d’une position à une autre qui lui apparaît comme plus représentative, ce qui renvoie sans aucun doute à un but stratégique. Et non seulement il n’avoue pas tout cela, mais il agit en toute désinvolture, obsédé qu’il est avant tout par la réalisation de son Art, son perfectionnement, la façon de le rendre accessible et efficace sur les esprits.
C’est pourquoi je pense qu’il est préférable de ne pas parler tant en termes d’ «influences» arabo-islamiques sur Llull, même si elles sont loin d’être négligeables, qu’en termes de présupposés communs entre lui et ses interlocuteurs. À ce titre, le cas des corrélatifs, présentés à la fois sous leur forme latine (ou catalane) et avec une référence explicite à la structure même de la langue arabe, c’est-à-dire en fait à la structure de la mentalité de l’interlocuteur, me semble caractériser tout l’esprit lullien envers l’Islam.
Notas
[1] D. Urvoy, Le monde des ulémas andalous du Ve/XIe au VIIe/XIIIe siècle. Étude sociologique. Genève, Droz, 1978. « La vie intellectuelle et spirituelle dans des Baléares musulmanes », Al-Andalus, XXXVII, 1, 1972, p. 87-132. « La structuration du monde des ulémas à Bougie au VIIe/XIIIe siècle », Studia Islamica, XLIII, 1976, p. 87-107.
[2] Surtout ceci voir D. Urvoy, Penser l’islam. Les présupposés islamiques de l’ « Art » de Lull, Paris, Vrin, 1980.
[3] Comme par exemple les affirmations d’un professeur égyptien, lors de l’hommage rendu à Asin Palacios, au Caire, en 1992, comme quoi Llull « fue un gran conocedor de la antigua filosofia griega e la islamica », ou encore que « el pensamiento de Ibn Bâjja influyo notablemente en el pensamiento cristiano de R. Llull » (G. Abdel Karim, « El pensamiento de Ramon Llull y la filosofia islamica », Bulletin of the Faculty of Arts, le Caire, n° 54, june 1992, p. 297-310). Sans parler de la production pour grand public qui atteint souvent le délire.
[4] Juan Fernandez de Ixar, Cancionero, éd. J.M. Azaceta, Madrid, C.S.I.C., 2 vol., 1966, t. II, p. 491-496.
[5] Voir Ch Lohr, Raimundus Lullus’ Compendium Logicae Algazelis. Quellen, Lehre und Stellung in der Geschichte der Logik, Inaugural-Dissertation, Freiburg im Breisgau, 1967.
[6] Voir Ch. Lohr, « Ramon Llull, Liber Alquindi and Liber Telif », Estudios Lulianos, XII, 2-3, 1968, p. 145-160.
[7] Th. Burman, « The influence of the Apology of Al-Kindî and Contrarietas alfolica on Ramon Lull’s late religious polemics, 1305-1313 », Mediaeval Studies, 53, 1991, p. 197-228.
[8] Ch. Lohr, Logica Algazelis, p. 12.
[9] Voir notre Penser l’islam, p. 57-63.
[10] Ch. Lohr, « Islamic influences on Lull’s Logic », Estudi General, 9, 1989, p. 147-157.
[11] J. Ribera, « Origenes de la filosofia de R. Lulio », in Homenaje a Menéndez y Pelayo, Madrid, 1899, t. II, p. 191-216.
[12] Voir D. Urvoy, « Les emprunts mystiques entre islam et christianisme et la véritable portée du Libre d’amic », Estudios Lulianos, XXIII, 1, 1979, p. 37-44.
[13] M. Asin Palacios, « Mohidin », Ibid., p. 217-256. Ibn Masarra y su escuela. Origenes de la filosofia hispano-musulmana, Madrid, 1917 ; réédition : Obras escogidas, t. I, Madrid, 1946, p. 1-216.
[14] Ch. Lohr, « The Arabic Background to Ramon Lull’s Liber Chaos (ca. 1285) », Traditio, vol. 55, 2000, p. 159-170.
[15] C’est l’avis émis par F. Maillo Salgado, « Paralelismo e influencia entre el islam y el cristianismo: ‘Els cent noms de Déu’ de Ramon Llull », Bull. Fac. Of Arts, 54, june 1992, p. 189-215.
[16] Voir Penser l’islam, p. 298-302.
[17] Libre de contemplacio, § 7. Obres essencials, Barcelone, 1960, t. II, p. 1181.
[18] Obres essencials, t. I, p. 1057.
[19] Voir Ch. Lohr, Leçon d’investiture comme magister de la Maioricensis Schola Lullistica, Estudios Lulianos, XVII, 1, 1973, p. 114-127.
[20] Raymundus Lullus : Opera . Mayence, 1722 ; réédition Minerva, Francfort sur le Main, 1962, t. IV, p. 441-442 et 446.
[21] Voir D. Urvoy, « Le rôle des facteurs culturels comme lien entre la mentalité islamique et la pensée lullienne : l’exemple de la musique »,Estudios lulianos, XIX, 1-3, 1975, p. 71-80.
[22] Voir D. Urvoy, « Les musulmans pouvaient-ils comprendre l’argumentation lullienne ? », Estudi general, 9, 1989, p. 159-170.
[23] Raymundus Lullus: Opera, Mayence, 1722, t. III, p. 452.
[24] Voir D. Urvoy, « Sur un aspect de la combinatoire arabe et ses prolongements en Occident », Arabica, t. XXXIX, 1992, p. 25-41.
[25] Leibniz, Historia et commendatio linguae charactericae universalis quae simul sit ars inveniendi et iudicandi. Œuvres philosophiques latines et françoises de feu Mr de Leibnitz…, publiées par Mr Rud. Eric Raspe, Amsterdam et Leipzig, 1965, p. 533-540. Voir aussi E.W. Platzeck, « Gottfried Wilhelm Leibniz y Raimundo Llull », Estudios lulianos, 47-48, 1972, p. 129-193.